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histoire-geo-ensemble.overblog.com

Un blog sur l'histoire, la géographie et l'éducation civique enseignées dans un collège de Fontenay-sous-Bois

Une règle en histoire : croiser et critiquer les sources !

Revenons sur une des bases de la méthode historique : le travail sur les sources.

En histoire, les sources sont la base de la connaissance. Ce sont des éléments qui permettent aux historiens de construire un récit des événements du passé. C'est l'historien qui déniche les sources, les interprète, les met en ordre et écrit l'histoire.

Parmi ces documents prenons l'exemple de deux sources qui nous donnent des informations sur un des épisodes célèbre de l'histoire des Hébreux et des Romains : la destruction du second temple de Jérusalem en 70 de notre ère.

Nous avons utilisé en classe deux sources principales pour évoquer cet événement :

- un texte de l'historien antique Flavius Josèphe et

- un bas relief de l'arc de triomphe de Titus à Rome.

Il s'agit donc d'une source écrite et d'une autre de pierre, monumentale, archéologique pour ainsi dire.

Les soldats romains étaient stimulés par leur haine des juifs et par l'espoir du butin.

Ils s'emparèrent de tout ce qu'ils trouvèrent et massacrèrent tous ceux qui se trouvaient là.

Le temple fut incendié.

Les Romains, jugeant inutile d'épargner les constructions voisines du Temple, incendièrent également les chambres des trésors, où étaient entassées des richesses immenses, d'innombrables vêtements et toutes sortes d'ornements, car les riches y avaient transporté les objets précieux de leurs maisons.

La Guerre des Juifs de Flavius Josèphe, fin du Ier siècle.

Photo de l'intérieur de l'arcade du côté gauche de l'arc de Titus à Rome et dessin de François Perrier (1590-1650) publié en 1645 époque où l'arc de Titus était moins endommagé que de nos jours.
Photo de l'intérieur de l'arcade du côté gauche de l'arc de Titus à Rome et dessin de François Perrier (1590-1650) publié en 1645 époque où l'arc de Titus était moins endommagé que de nos jours.

Photo de l'intérieur de l'arcade du côté gauche de l'arc de Titus à Rome et dessin de François Perrier (1590-1650) publié en 1645 époque où l'arc de Titus était moins endommagé que de nos jours.

Que nous apprennent donc des documents ? Comment faut-il les lire ? Faut-il forcément les croire ? Que nous apprend leur mise ne relation ?

Il convient de se poser plusieurs questions sur ces sources. Comprendre qui les a écrite ou faite, dans quel but, pour dire quoi et à quelle époque.

On peut déjà se dire qu'ils ont été réalisés à l"époque même des faits. C'est un indice qui montre une certaine fiabilité. Une proximité avec l'événement en question. En effet, Flavius Josèphe est né dans une famille juive de Jérusalem en 37 de notre ère et est mort à Rome vers l'an 100. Rallié aux Romains, il se spécialise dans l'histoire de la Judée. Il décrit des événements qu'il a vécu de près puisqu'il a servi de traducteur et de négociateur aux Romains lors du siège de Jérusalem mené par Titus en 70. Titus qui ne devient empereur qu'en l'an 79 est alors au service de son père l'empereur Verpasien.

Le second document est un bas relief qui figure sur l'arc de triomphe érigé à Rome en l'an 81 en l'honneur de Titus qui vien de décéder. Cette oeuvre monumentale est donc réalisée à peine une dizaine d'année après les faits décrits.

Que nous apprennent ces documents ?

Le texte nous apprend que le temple de Jérusalem, lieu sacré pour les Hébreux a été incendié par les soldats de Rome. Il s'agit de ce que l'on appelle le second temple. Le premier avait été, d'après la Bible, construit sur ordre du roi Salomon pour abriter l'arche d'Alliance au Xe siècle av. J.-C.. Aucune trace archéologique n'a été retrouvée de cet édifice. Il a été détruit par les Babyloniens en 587 av. J.-C..

Le second temple fut construit au même endroit de 536 à 515 av. J.-C.. Puis le roi Hérode le Grand le fit rénover et agrandir à partir de 19 av. J.-C.. C'est ce second temple remanié "à la mode romaine" à la fin du premier siècle avant notre ère qui est mis à sac, pillé et incendié par les légions de Titus que Flavius Josèphe assure stimulées par "l'espoir du butin". L'auteur sous entend que les soldats de Rome sont avides de richesses.

Le second document, ce bas relief de l'arc de Titus montre en effet des soldats romains victorieux (avec des couronnes de laurier sur la tête) transportant divers objets. On remarque distinctement un chandelier à sept branche, une menorah, un des objets en or qui ornait l'intérieur du temple de Jérusalem. Ils emportent aussi deux des trompettes en argent qui seraient au service divin. On apprend donc que le Temple a été pillé en même temps que détruit.

Ces deux sources donnent un regard croisé sur la destruction du Temple et son pillage par les troupes de Rome. Les faits sont certains. Le lieu de culte central des Hébreux est démoli, il n'en reste aujourd'hui que quelques vestiges (dont le mur dit des Lamentations, mur de soutènement occidental de l'esplanade du Temple) et certains des objets précieux du culte sont pris par les Romains. Ils symbolisent la victoire de Titus contre les révoltes juives de 70.

Le mur des lamentations (photo Loïc Damiani)

Le mur des lamentations (photo Loïc Damiani)

Que ne nous disent pas ces documents ?

Ce que ne disent pas les documents c'est pourquoi les Romains ont-ils détruit le Temple dans une province qu'ils contrôlaient depuis plus de 130 ans. Cet extrait de texte ne parle pas des causes de cette guerre. La Grande Révolte juive de 66 causée par des tensions avec les Grecs et une hostilité croissante de la population juive face à la domination romaine.

Faut-il prendre le témoignage de Flavius Josèphe pour argent comptant lorsqu'il évoque les soldats romains et "leur haine des juifs" ? Il ne faut pas oublier que, même s'il est rallié aux Romains, l'auteur du texte est issu d'une famille de prêtes. La réalité des rapports de domination entre les Romains et leur vassaux juifs est sans doute plus complexe que cette simple phrase écrit après la destruction du Temple. En effet, l'écrasement des révoltes juifs revêt un enjeu important pour la stabilité de l'empire et les luttes d'influence politique à Rome.

Ces deux documents nous donnent donc des renseignements sur des faits, des événements historiques. Mais ils ne disent pas tout car ils sont partiels. Ils nous montrent une partie de la réalité. Mais pour la bien découvrir, il convient confronter ces sources, de voir comment elles se complètent et aussi ce qu'elles ne disent pas.
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